Page:Boutroux - Pascal.djvu/147

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Persuadé que le plus grand bienfait des sciences était de nous mettre en possession de méthodes propres à démontrer, autant qu’elles peuvent l’être, les vérités de la religion, il prétendit faire voir, en ce sens, que la religion chrétienne avait autant de marques de certitude que les choses qui sont reçues dans le monde pour les plus indubitables. Cependant il songea que ceux qu’il combattait dans les Provinciales faisaient profession, eux aussi, de ramener à l’Église les incrédules. Or leurs principes n’étaient propres qu’à faire échanger une impiété contre une autre. Il ne suffisait donc pas de combattre les ennemis du dehors, il fallait combattre aussi ceux du dedans. C’était au christianisme véritable, à celui qui régénère et qui sauve, non à un vain simulacre de la religion du Christ, qu’il s’agissait de convertir les hommes. Et ainsi, son ouvrage sur la, religion devait être la condamnation des fausses Doctrines des jésuites, en même temps que la réfutation des mauvais raisonnements des libertins.

Pour composer cet ouvrage, il lut et relut l’Écriture et les Pères, principalement saint Augustin. Il se servit aussi d’un ouvrage du xiiie siècle, dirigé surtout contre les juifs, qui venait d’être réimprimé à Paris en 1651, le Pugio fidei du dominicain catalan Raimond Martin. Mais surtout il médita ; il donna un soin particulier à l’ordre des pensées, qui, selon lui, faisait la force du discours.

Ayant déterminé les lignes principales de son plan, il l’exposa un jour à Port-Royal dans une conférence qui dura deux ou trois heures. Ces Messieurs furent charmés de son discours, et jugèrent