Page:Boutroux - Pascal.djvu/27

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son intelligence, en se passant des vérités éternelles.

Si les auteurs de ces livres n’avaient fait appel qu’au sentiment, aux mouvements aveugles du cœur, ou encore s’ils s’étaient bornés à citer et commenter des textes, il est probable qu’ils eussent médiocrement touché Pascal. Mais ils exposaient une doctrine, un système bien lié ; ils prescrivaient d’ordonner toutes les puissances de l’âme en vue d’une fin unique. Et cette fin n’était autre que la participation à l’excellence divine elle-même. Par tous ces traits, les enseignements de Jansénius et de ses amis s’accordaient singulièrement avec le caractère de Pascal. Il était de ceux que le devoir attire, et qu’il fascine d’autant plus qu’il est plus rigoureux. Il trouva plus facile de se renoncer entièrement que de se donner à moitié. Il jugea, d’ailleurs, qu’il n’avait pas le choix ; car sa raison, maintenant, lui représentait que se partager entre Dieu et le monde, c’était prétendre unir les contradictoires ; et des deux partis, il était trop clair que c’était celui de Dieu qu’il fallait embrasser.

Il se convertit donc. Ôtant de son cœur tout intérêt mondain, il forma le propos de ne plus vivre que pour Dieu, de ne rechercher que lui, de ne travailler à autre chose sinon à lui plaire. Il résolut, notamment, de mettre fin à ces curieuses recherches auxquelles il s’était appliqué jusqu’alors, pour ne plus penser qu’à l’unique chose que Jésus-Christ déclare nécessaire. Il entreprit d’étudier sérieusement, non plus les sciences, mais la religion ; et en même temps il commença à goûter les charmes de la