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Page:Bouvier - Les Mystères du confessionnal, 1875.djvu/144

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GUIDE DES ÂMES

Taxe de la Chancellerie romaine pour tous les péchés


Le confessionnal, foyer de corruption, centre d’intrigues amoureuses, de cabales politiques, est également un comptoir où se débattent les questions d’intérêt. Le curé ou le cureton, c’est-à-dire le chef d’une paroisse ou son vicaire qui confesse, ne néglige jamais les intérêts de l’Église et les siens propres ; l’argent est au fond de toutes les controverses qui s’agitent au tribunal de la pénitence entre le prêtre et son client. Suborner une femme, débaucher une jeune fille, cupidonner avec les garçonnets, commettre des actes de sodomie et de pédérastie, sont joyeusetés et passetemps pour les soutaniers et les frocards ; mais l’affaire principale, la grande question, c’est l’argent à faire passer de la maison des fidèles à la cure et à l’évêché ou dans le gouffre béant qu’on nomme le trésor de l’Église.

Pour se convaincre de la vérité de notre assertion, on n’a qu’à jeter un coup d’œil sur un livre qui a pour titre « Guide des âmes. » Cet opuscule porte en sous-titre : Taxe de la Chancellerie romaine pour tous les péchés. L’objet et le but du livret se trouvent suffisamment expliqués par les deux titres ; il s’agit de guider les âmes dans la voie du salut, en faisant connaître aux fidèles combien ils ont à payer pour chaque péché. Conséquence : faire affluer dans les caisses de l’Église la plus grosse part de richesses qu’il sera possible d’arracher à la bêtise humaine.

Nous relevons certains articles de ce livre curieux, ne pouvant le reproduire en entier. L’ouvrage a été fait à Rome ; il porte le sceau et les armes de la grande chancellerie, il est revêtu de l’approbation du cardinal président la consulte. Plusieurs conciles et synodes en ont recommandé la propagation dans tous les pays catholiques, et les papes ont ordonné aux chefs de diocèses d’en suivre les prescriptions.

L’absolution pour celui qui connaît charnellement sa mère, sa sœur, ou quelque autre personne ou alliée, ou sa commère de baptême ; elle est taxée à vingt livres tournois et cinq carlins.

L’absolution pour celui qui dépucelle une jeune fille ; elle est taxée à dix livres tournois, cinq ducats et six carlins.

L’absolution pour celui qui révèle la confession de quelque pénitent ; elle est taxée à sept livres tournois.

L’absolution pour celui qui a tué son père, sa mère, son frère, sa sœur, sa femme ou quelque parent ou allié, laïque ; elle est taxée à trente livres tournois et cinq carlins ; mais si le mort était ecclésiastique, l’homicide serait obligé, outre l’amende, de visiter les saints lieux.

L’absolution pour un acte de paillardise quelqu’il soit, commis par un clerc, fût-ce avec une religieuse dans le cloitre ou dehors, ou avec ses parentes ou alliées, ou avec sa fille spirituelle, sa filleule ou avec toute autre femme ; elle coûte trente-six livres tournois, trois ducats.

L’absolution pour un prêtre qui tient une concubine dans sa cure et qui l’a engrossée ; elle coûte vingt et une livre tournois, cinq ducats, six carlins.

L’absolution pour toute sorte de péchés de la chair commis par un laïque ; elle se donne au for de la