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Page:Bouvier - Les Mystères du confessionnal, 1875.djvu/30

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doit pas, ordinairement, être absous avant que la séparation ait eu lieu, parce qu’il se trouve dans l’occasion prochaine de pécher : Dieu et la nature, du reste, nous imposent l’obligation formelle de fuir l’occasion prochaine de pécher. Aussi, Alexandre VII a-t-il condamné la proposition suivante : Celui qui vit en concubinage n’est pas obligé de renvoyer sa concubine si elle est par trop utile au charme de sa vie, vulgairement régal ; si elle venant à lui manquer, il doit tomber dans un trop grand chagrin ; si des mets préparés par d’autres doivent lui être insupportables et s’il lui est trop difficile de trouver une autre servante. Ici, on suppose la résolution de ne pas tomber dans le péché, et, cependant cette proposition est déclarée fausse.

J’ai dit ordinairement : car il y a des cas dans lesquels l’absolution doit être donnée sous la seule promesse de séparation, et même sur la seule résolution de ne plus pécher par la suite ; à savoir : 1o Si, à différents indices on reconnaît que le pénitent est véritablement repentant, et qu’au premier ou second avertissement il promette de cesser le commerce ;

2o Si du refus de l’absolution il doit résulter déshonneur ou scandale grave, si une jeune fille devait être soupçonnée de mener une mauvaise vie parce qu’elle n’approcherait pas de la sainte table, ou si un prêtre devait scandaliser le public en ne célébrant pas la messe de paroisse.

On suppose la vraie contrition.

3o On ne doit pas exiger la séparation quand elle est impossible, comme lorsque c’est une fille ou un fils de famille qui commettent le péché avec un domestique ou une servante de la maison paternelle. On éprouve d’abord ceux qui sont dans ce cas, en différant l’absolution, et s’ils éloignent l’occasion d’une faute prochaine et qu’on juge qu’ils ont le repentir sincère du péché, on devra leur donner l’absolution.

4o Lorsque deux personnes vivant secrètement en concubinage, ou seulement soupçonnées d’impudicité, ne peuvent se séparer sans grave danger de déshonneur ou de scandale, il faut faire de grands efforts pour les corriger, d’abord en refusant, ensuite en donnant l’absolution s’ils persévèrent dans leur résolution. Billuart, t. 13. p. 352, dit que, dans ce cas, il ne voudrait condamner ni le pénitent, ni le confesseur. Je ne serai pas plus rigoureux que lui.


§ III. — De la prostitution


La prostitution est un métier ou un acte comme métier, c’est la condition d’une femme prête à recevoir le premier venu et ordinairement pour de l’argent ; comme fait, c’est l’union charnelle d’un homme avec une telle femme, ou d’une telle femme avec l’homme qui se présente.

Il est certain que la femme qui se livre à la prostitution commet un plus grave péché que celle qui se livre à la simple fornication, ou même que la concubine, à cause de sa disposition d’esprit, du scandale et du préjudice causé à la propagation de l’espèce. Aussi, les courtisanes ont-elles toujours été regardées comme la lie et l’opprobre du genre humain. Il ne suffit donc pas qu’une courtisane déclare en confession le nombre de ses fornications, elle doit déclarer son état de courtisane.

Cependant, Sylvius, Billuart, Dens et d’autres théologiens enseignent comme très-probable que l’homme qui a forniqué avec une courtisane n’est pas tenu de déclarer cette circonstance, parce que toutes choses égales d’ailleurs, cette fornication, à leurs yeux, ne constitue pas une faute plus grave.