Page:Bove - Mes Amis.djvu/54

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

Je m’en voulus de l’avoir suivi ; mais je vis seul, je ne connais personne. L’amitié serait pour moi une si grande consolation.

Maintenant, il m’était impossible de le lâcher puisque nous cheminions l’un près de l’autre, dans la même direction.

Pourtant, au coin d’une rue, j’eus envie de me sauver. Une fois loin, il aurait pu penser de moi ce qu’il lui eût plu. Mais je n’en fis rien.

— As-tu une cigarette ? me demanda-t-il tout à coup.

Instinctivement je jetai un coup d’œil sur son oreille, mais, pour ne pas le froisser, je baissai vite les yeux.

À mon avis, il aurait d’abord dû fumer sa cigarette. Il est vrai qu’il pouvait l’avoir oubliée.

Je lui donnai une cigarette.

Il l’alluma sans s’enquérir s’il m’en restait et continua de marcher. Je le suivais toujours, ennuyé devant les passants par son indifférence. J’aurais voulu qu’il se fût penché vers moi, qu’il m’eût interrogé, ce qui m’aurait permis de prendre une attitude.

La cigarette offerte par moi avait renforcé nos relations. Je ne pouvais plus m’en aller :