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Page:Boyer d’Argens - Lettres juives, 1754, tome 1.djvu/317

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que Dieu donna autrefois des rois à Israël.

Un enfant dans le berceau est révéré comme un Dieu dès le moment de sa naissance. A peine quelquefois a-t-il atteint l’âge de raison qu’il devient l’arbitre du sort de plusieurs millions d’hommes qui sont les victimes de ses caprices. S’il aime la guerre, il va faire périr un nombre infini de ses sujets. S’il est magnifique & qu’il se plaise à construire des palais & à faire bâtir des édifices publics, il les ruinera.

Ainsi ils sont toujours destinés à servir de victimes à ses différents caprices. Huit ou dix mille hommes de moins sont à un souverain comme huit ou neuf cents mille livres dont il achete une place. S’il paroît quelquefois balancer dans ses projets, s’il épargne leur vie, il ressemble à celui qui marchande, & qui est mieux instruit qu’un autre du prix & de la valeur de l’argent.

Un philosophe regarde avec étonnement cent mille hommes rangés sur trois lignes, qui vont se battre & s’acharner contre cent mille autres pour contenter l’ambition de deux personnes. Est-il rien de plus extraordinaire que de voir deux hommes nés à quatre cents lieues l’un de l’autre, qui n’ont rien à démêler entr’eux, fondre mutuellement l’un sur