Page:Boyer d’Argens - Lettres juives, 1754, tome 2.djvu/139

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Les docteurs nazaréens qui établissent l’opinion des supplices éternels sur les termes précis de leurs livres sacrés, ne sont pas mieux fondés que nos rabbins. Ils conviennent qu’il ne faut point s’en tenir quelquefois au sens littéral de certaines expressions. Pourquoi donc n’interprêtent-ils point ces paroles de feu éternel, de tourment sans fin, d’une manière qui ne blesse point l’idée que l’on a de la miséricorde céleste ? Ils répondent à cela, que la justice de Dieu est un attribut qui lui est aussi essentiel que sa clémence ; & que sa justice demande qu’il punisse les fautes. Mais cette réponse est encore un faux-fuyant. Car sa justice pouvant être satisfaite par une peine momentanée, elle ne doit point en exiger une éternelle. Et la question se réduit de nouveau au point de sçavoir si Dieu n’a pû faire que les péchés les plus énormes pussent être expiés par des tourmens passagers ? Sans doute il l’a pû faire étant tout-puissant. Il l’a donc fait, parce qu’il fait toujours ce qu’il y a de mieux & de plus charitable, de plus clément & de plus miséricordieux, & qu’il est plus conforme à la clémence & à la miséricorde d’imposer des peines passagères, que d’éternelles.

Il y a une difficulté qui s’offre à l’esprit en faveur des théologiens rigides.