Page:Boyer d’Argens - Lettres juives, 1754, tome 2.djvu/196

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tout : & comme le curé alloit faire ses fonctions. Monsieur, lui dit-il, puisque je suis assez malheureux que de mourir dans mon lit, après avoir échappé de dix batailles & de vingt siéges, adoucissez, s’il vous plaît, ma peine : ne me soumettez point à la cérémonie des bourgeois. Changez-y de grace quelque chose ; & si pour être sauvé, il faut absolument que je sois frotté, je crois que de l’eau-de-vie mêlée avec de la poudre à canon seroit un onguent qui conviendroit mieux que de l’huile à mon état de militaire, & à ma condition de noble.

Porte-toi bien, mon cher Brito, & songe à vivre heureux & content.

De Paris, ce…

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Lettre XLIX.

Jacob Brito à Aaron Monceca.

Je suis arrivé à Venise depuis six jours. Je n’avois point encore vû de ville qui eût offert à mes yeux un spectacle aussi singulier. C’est une chose à laquelle on s’accoutume difficilement, que de voir sans étonnement une ville bâtie au milieu de la mer, &