Page:Boyer d’Argens - Lettres juives, 1754, tome 2.djvu/217

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un autre embarras qui n’est pas moins considérable. Le trop grand nombre d’historiens, le peu de connoissance & de capacité de la plupart d’entr’eux, jettent l’esprit dans la confusion, & nuisent beaucoup à la précision & à la vérité qu’on doit chercher dans l’arrangement des faits dont on veut faire comme un recueil dans son entendement pour s’en servir dans l’occasion par le secours de la mémoire. L’amas indigeste de mille choses inutiles, dont les historiens remplissent leurs ouvrages, énerve l’esprit du lecteur ; & la quantité de faits, ou faux, ou de peu d’utilité, emporte l’attention qu’on ne devroit donner qu’à ceux qui sont assez importans pour devoir nous occuper.

Les anciens historiens Grecs & Latins qui nous restent aujourd’hui ont été épurés par le tems. Quand je dis épurés, je n’entens point parler de leurs ouvrages, dont on est très-malheureux d’avoir perdu des morceaux considérables. Mais je veux dire qu’ils sont les seuls qui soient parvenus jusqu’à nous, qui n’aient point subi le trépas, & ne soient point tombés dans l’oubli où sont demeurés beaucoup d’écrivains médiocres qu’il devoit y avoir dans leur tems. Car tous les siécles ont fourmillé en mauvais auteurs, de qui les écrits