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Page:Boyer d’Argens - Lettres juives, 1754, tome 3.djvu/178

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d’apprendre à juger sainement de ses connoissances, & de ne pas croire sçavoir ce que l’on ignore.

De la manière dont on étudie aujourd’hui, il est certain qu’on doit découvrir dans trente années plus de vérités qu’on n’en a connu dans deux mille. Comme on ne raisonne que sur des principes clairs, qu’on ne reçoit pour certain que ce qui est évident, la raison, qui n’est plus offusquée par un nombre d’erreurs qui la tenoient captive, agit plus efficacement & développe plus aisément les secrets qu’elle cherche à découvrir.

Les hommes, dit un illustre Philosophe [1], ne tombent pas seulement dans un fort grand nombre d’erreurs, parce qu’ils s’occupent à des questions qui tiennent de l’infini, leur esprit n’étant pas infini ; mais aussi, parce qu’ils s’appliquent à celles qui ont beaucoup d’étendue, leur esprit en ayant fort peu.

C’est encore-là une source inépuisable des erreurs de l’ancienne philosophie. Elle embrassoit des questions que l’esprit humain ne sçauroit résoudre, & qui sont au-dessus de sa portée. Les philosophes scholastiques s’occupoient peu des choses

  1. Mallebranche, recherche de la vérité, Lib. III, Chap. III p. 179