Page:Boylesve - Le Parfum des îles Borromées, 1902.djvu/184

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maris : restent deux garçons, dont l’un a l’air vraiment aussi inoffensif qu’il l’est en réalité, dit-on. Ce n’est donc pas Monsieur Lee que l’on soupçonnera…

— Mais bien Monsieur Dompierre, se hâta de prononcer Luisa pour éviter à Mme  de Chandoyseau le plaisir de l’embarrasser on lui jetant ce nom à la figure, et d’épier l’effet que pourrait produire l’invention des relations du jeune homme avec la belle marchande de fleurs.

Et elle ajouta dans son imprudente franchise :

— Monsieur Dompierre ? mais c’est absurde !

— Vous trouvez ? pourquoi donc ? il faudrait prouver que c’est absurde !… Pardon ! je comprends votre générosité : vous voulez défendre ce jeune homme qui est notre ami ; très bien ! Je ne demanderais pas mieux que de m’associer à vous dans la circonstance. Monsieur Dompierre est un homme charmant, tout à fait charmant ; il a tout à fait l’aspect d’un galant homme, et il l’est, je veux le croire. Mais enfin, quand il s’agit d’établir une responsabilité qui peut peser sur les nôtres, aujourd’hui ou demain, je crois qu’il faudrait faire abstraction de nos sympathies et ne plus craindre de montrer au besoin la dent dure.

— Mais pour accuser quelqu’un, encore faut-il avoir des présomptions…

— Je vous les ai fournies en éliminant ceux sur lesquels ces présomptions ne peuvent tomber.

— Dans tous les cas, je ne crois pas que Monsieur Dompierre ait une fortune à la répandre aux pieds d’une fille aussi largement que semble le faire la personne qui s’intéresse à la Carlotta…

— Ah ! vous connaissez son état de fortune ? Il vous a fait des confidences ? Je ne suis pas si avancée ! Il s’est montré toujours si réservé, si mystérieux, si cachottier…