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Page:Boylesve - Le Parfum des îles Borromées, 1902.djvu/236

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posée à mesure que le jeune homme racontait ce qui lui était arrivé dans la rue et sur la place de Bellagio.

— Mon pauvre ami ! s’écria-t-elle, vous ne savez pas ; non, vous ne pouvez pas savoir quelles imprudences vous commettez !

Monsieur Belvidera, dit-elle à son mari, laissez-moi un instant parler à Monsieur Dompierre ; il s’agit pour lui de quelque chose d’assez grave, et dont le bruit est venu jusqu’à moi : il faut que je l’avertisse…

M. Belvidera s’éloigna de quelques pas, et, ayant rejoint le clergyman qui revenait par une contre-allée, il le suivit en causant.

Le révérend marchait d’un pas fiévreux et semblait pressé déjà de rentrer à l’hôtel.

La jeune femme mit Gabriel au courant de la conversation qu’elle avait eue la veille avec Mme de Chandoyseau avant le départ pour Cadenabbia. Elle lui montra comment la Parisienne avait répandu le bruit qu’il était l’amant de la Carlotta. Celle-ci étant le point de mire de toute la population, et la source de sa fortune demeurant mystérieuse, le seul nom prononcé d’un protecteur de la fille avait suffi pour attirer sur lui l’attention générale. On se le montrait au doigt dans la rue.

— Comprenez-vous, dit-elle, le succès que vous avez eu quand vous lui avez adressé la parole sur la place ? Vous avez causé un vrai scandale ! Et les bravos de Monsieur de Chandoyseau, le premier averti de l’affaire et le colporteur inconscient du potin ?… et la mine effarouchée du révérend Lovely ?… et les « c’est lui » des dames françaises de l’hôtel, avec qui Madame de Chandoyseau a eu vite fait connaissance ? Eh bien, mon ami, vous voilà dans de beaux draps !

— Après tout, dit Dompierre, je préfère qu’elle ait