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D’UN HOMME COMPLÈTEMENT NU

touché récemment un pape déposé et monseigneur l’Électeur de Bavière et qu’enfin je sois entré dans les bonnes grâces de Frère Jérôme qui sent le fagot à plein nez !

Je me tenais à une petite distance, n’aimant point importuner, de mon naturel, et encore moins me mêler de ce qui n’est point mon affaire. L’homme nu entra dans une rue assez déserte et avisa quelqu’un qui portait sans méfiance deux petits sacs de monnaie de la contenance d’environ cent ducats. Il n’eut que le temps de lui poser la main à l’endroit du gosier, et se logea les deux petits sacs sous l’aisselle. J’admirai sa dextérité et vis que le pauvre porteur, étendu dans le ruisseau, avait la pâleur de la mort.

Tout en suivant l’homme nu, je rendais aussi justice à la finesse de mon hôtelier qui avait soupçonné que ce misérable était sans sacrements.

J’allais déboucher sur une place ornée en son milieu d’une fontaine d’eau vive où des jeunes filles badoises emplissaient paisiblement leurs cruches, et devisaient avec des poses assez ave-