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Page:Boylesve - Mademoiselle Cloque, 1899.pdf/153

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MADEMOISELLE CLOQUE

dire une méchanceté ou de lâcher quelque égrillardise enrubannée à la mode d’antan.

— Fi ! le vilain coureur ! dit Mlle Cloque.

— Hélas ! ma bonne amie, je suis passé chez vous sans vous rencontrer ; vouliez-vous que je fisse ma partie avec Mlle Pelet ?

— Vous l’avez donc vue ?

— Je l’ai fait déjeuner.

— J’espère, au moins, que vous lui avez servi son paquet ?

— Non, dit-il, je vins la voir, au dessert : elle était ivre.

— Comment ! vous avez fait boire cette malheureuse ! mais c’est ignoble !

— Ce qui est ignoble, c’est qu’elle ait perdu l’habitude de boire et de manger. La seule vue de la table l’a grisée. Elle est si gourmande ! Je n’oserai jamais lui faire de chagrin.

— Oui, on sait qu’il suffit d’un défaut pour vous attendrir… Enfin ! Dieu vous pardonnera peut-être parce qu’il y a un peu de bonté en vous.

Mme Pigeonneau, montée sur un escabeau, venait d’atteindre des objets soigneusement enveloppés et faisait de mystérieux gestes à Mlle Cloque : « Venez donc voir ! venez donc voir !… » Le marquis, tout en causant, ne perdait pas une ligne de la taille de la jeune femme qu’il était agréable de voir se tendre avec les bras levés, ou se courber soudain sur la table, portant sur un seul coude, un petit doigt taquinant la bouche.