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Page:Boylesve - Mademoiselle Cloque, 1899.pdf/192

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MARCHE LENTE

vin, reprit par cœur la louange du nouveau conseiller municipal, qui lui avait si mal réussi lors de sa dernière visite. Elle la colportait partout depuis lors ; elle avait contribué au succès de Loupaing et venait de toucher sa récompense.

Mlle Cloque la poussa doucement jusqu’à une chaise, car elle titubait.

— Croyez-vous, dit Mariette, que ça ne mérite pas la damnation ?

La Pelet, un peu calmée, après le premier flot de paroles, marmottait sur sa chaise :

— Nous la tenons, il l’a bien dit, oui, nous la tenons, de ce coup-là, la fraternité universelle !… Fallait un homme… le voilà ! Le fait est qu’il est bâti… et râblé… Mais qu’est-ce que je dis donc là, bonne Sainte Vierge ! devant cette chère demoiselle qui est confite en dévotion ?… Vous m’avez mise à la porte, je le sais : c’est une faute, c’est pas diplomate — on me l’a dit, c’est pas moi qui le dis, — ça ne fait rien, je ne suis pas rancunière pourvu qu’on prenne soin de mon malheureux corps… Eh pardi ! c’est toujours les entrailles qui sont d’un chétif !… Elles ne veulent rien garder, ça je peux le dire, mademoiselle Cloque : figurez-vous un caniveau où on passerait le balai à toute heure… Ça n’empêche pas que si c’était un effet de votre bonté, j’aimerais bien que vous me donniez à boire !…

La bonne et sa maîtresse levaient les mains et cherchaient un moyen de dégriser la misérable.