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Page:Braddon - Aurora Floyd, 1872, tome I.djvu/244

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AURORA FLOYD

Mellish. Les rideaux du petit sanctuaire n’étaient pas tirés, et Mme Powell put voir le maître de la maison penché sur sa table, à côté du vieux piqueur. Il faisait alors tout à fait nuit. Mais cependant on pouvait encore apercevoir la robe blanche d’Aurora de l’autre côté de la pelouse.

Mme Mellish était debout auprès de la petite grille de fer quand Mme Powell sortit de la maison. Le point blanc demeura immobile pendant quelque temps, et l’indiscrète veuve, qui se tenait sous l’ombre d’une allée, commençait à croire qu’elle avait perdu ses peines, et qu’après tout la sortie d’Aurora n’avait peut-être pas de but spécial.

Mme Powell éprouvait un cruel désappointement. Toujours à l’affût d’un indice qui pût lui révéler le secret dont elle avait découvert l’existence, elle s’était bercée de l’espoir que cette sortie si peu raisonnable pourrait être un des anneaux de la chaîne mystérieuse qu’elle tenait tant à réunir. Mais il paraissait qu’elle s’était trompée ; cette sortie de nuit, par ce temps menaçant, était tout simplement un caprice d’Aurora, une fantaisie de femme qui ne signifiait absolument rien.

Mais non ! la masse blanche n’était plus immobile, et dans le silence de la nuit brûlante, Mme Powell entendit le grincement lointain d’une grille qui tourna lentement sur ses gonds, et comme guidée par une main prudente. Mme Mellish avait ouvert la grille, et avait passé de l’autre côté de la barrière invisible qui séparait le jardin du parc. Un moment après, elle avait disparu sous les arbres qui formaient une ceinture autour de la pelouse.

Mme Powell s’arrêta, presque terrifiée par cette découverte inespérée.

Au nom de tout ce qui était mystérieux et impénétrable, que pouvait avoir à faire Mme Mellish entre neuf et dix heures du soir de ce côté du parc, de ce côté nord, mal entretenu, abandonné et fréquenté seulement depuis un grand nombre d’années par les gardes du château ?

Le sang monta bouillant à la face de Mme Powell, quand elle se souvint tout à coup que la loge abandonnée qui se trouvait de ce côté venait d’être donnée pour logement au