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Page:Braddon - Aurora Floyd, 1872, tome II.djvu/214

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AURORA FLOYD

meil, se nourrissant de son chagrin ; sa conversation avec Lucy l’avait reposée, et elle dormait paisiblement après l’orage.

Lucy s’assit près du lit, veilla la dormeuse un moment, puis sortit sans bruit de la chambre sur la pointe des pieds. Elle alla, bien entendu, raconter à son époux tout ce qui s’était passé, et prendre conseil de sa suprême sagesse.

Elle trouva Talbot seul dans le salon ; il avait fait un triste déjeuner en compagnie de John, et son hôte l’avait abandonné en hâte après le repas. On n’avait pas entendu le bruit d’une seule voiture sur la route sablée durant toute la matinée : il n’y avait pas eu de visiteurs à Mellish Park depuis le retour de John ; car l’horrible scandale s’était répandu dans tout le pays, et ceux qui parlaient du jeune squire et de sa femme le faisaient d’un ton solennel, en se demandant bravement si quelques démarches sérieuses ne devaient pas être faites au sujet de cette affaire, qui occupait tous les esprits.

Lucy répéta à Talbot tout ce qu’Aurora lui avait dit. Ce n’était pas un abus de confiance dans le code de morale de la jeune femme ; car elle et son mari ne faisaient-ils pas qu’un, et aurait-elle pu avoir des secrets pour lui ?

— Je pense comme vous, — dit Bulstrode quand Lucy eut fini son récit.

— Que pensez-vous, cher ?

— Que la rupture entre John et Aurora est sérieuse. Ne me regardez pas d’un air si triste, ma chérie. C’est notre affaire de les réunir. Vous allez consoler Aurora, Lucy ; moi, je veillerai sur John.

Bulstrode embrassa sa femme et s’en alla remplir son amicale mission. Il trouva John dans sa chambre, la chambre dans laquelle Aurora lui avait écrit le jour de sa fuite, la chambre d’où l’arme meurtrière avait été volée par une main inconnue. John avait caché le pistolet rouillé dans un des tiroirs de son secrétaire ; mais il ne faut pas croire que cette découverte eût pu être tenue secrète ou cachée longtemps. Elle avait été complètement discutée à l’office, et qui doutera qu’elle n’eût été plus loin, en se faufilant à tra-