— demanda le Colonel ; — est-ce qu’il s’était fait prendre en grippe d’une manière ou d’une autre ?
— J’aurais peine à le croire. Il n’était chez moi que depuis une semaine environ.
Les domestiques, qui s’étaient dispersés sur l’ordre de John, n’étaient pas allés bien loin. Ils étaient restés dans les corridors, prêts au moindre appel à se précipiter de nouveau dans le vestibule et à jouer leur rôle de comparses dans le drame ; ils préféraient faire n’importe quoi plutôt que de rentrer tranquillement dans leurs chambres respectives.
Ils arrivèrent donc dès que Mellish eut appelé.
Il donna ses ordres brièvement, choisit deux hommes, et renvoya les autres à leurs affaires.
— Apportez deux ou trois lanternes, — dit-il, — et suivez-nous jusqu’à l’étang.
Le Colonel Lofthouse, Prodder et Mellish sortirent ensemble de la maison. La lune continuait à s’élever lentement dans la voûte céleste ; elle argentait les vastes pelouses et éclairait au loin la cime des arbres. Les trois gentlemen avançaient d’un pas rapide, conduits par Prodder, qui marchait un peu en avant ; après eux venaient deux grooms qui portaient des lanternes d’écurie.
En entrant dans le bois, ils s’arrêtèrent involontairement pour écouter ce cri solennel qui avait d’abord attiré l’attention du marin et avait fait naître en lui l’idée qu’un crime avait été commis : les hurlements du chien. Ils résonnaient dans la nuit comme une plainte faible et prolongée, un long et monotone cri de mort.
Ils suivirent cette sinistre indication pour se rendre à l’endroit où ils avaient besoin d’aller ; ils avancèrent sous l’allée ombreuse et arrivèrent sur la pièce argentée de gazon et de fougère où le kiosque délabré pourrissait lentement. Les deux corps, celui de l’homme étendu au bord de l’eau et celui du chien, la tête levée vers la nue, étaient exactement comme le marin les avait laissés trois quarts d’heure auparavant. Le garçon du Grand Cerf se tenait à quelque distance ; il s’avança au-devant du groupe qui approchait.