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HENRY DUNBAR

parmi des débris de tabac, des bouts de cigares pétrifiés et des chiffons de papier, se trouvaient quelques lettres.

Margaret les ramassa et les examina. Trois d’entre elles, très-vieilles, jaunies, et presque en lambeaux, portaient l’adresse suivante : Joseph Wilmot, aux soins du gouverneur de l’île de Norfolk. Les caractères étaient soignés et réguliers et révélaient une main exercée.

C’était une terrible découverte. Margaret courba la tête sur ses genoux et sanglota tout haut.

— Il avait été bien coupable et avait besoin d’une longue vie de repentir, — songea-t-elle, — mais il a été assassiné par Dunbar.

Il n’y avait plus l’ombre de doute dans son esprit. Elle avait en main la preuve concluante de l’identité de Wilmot avec son père, et, pour elle, cela suffisait à prouver que Dunbar était l’assassin de son ancien valet. Il avait fait du tort à Wilmot, et Wilmot pouvait lui en faire à son tour. Il avait donc résolu de se débarrasser de ce vieux complice, de ce dangereux témoin du passé.

C’était ainsi que raisonnait Margaret. Elle n’eut pas un instant l’idée que le crime commis dans le paisible petit bois, près de Sainte-Cross, était du nombre de ceux qui se commettent chaque jour pour les motifs les plus vils et les plus mesquins qui puissent pousser un homme à verser le sang de son semblable. Cette idée pouvait venir à d’autres, mais c’était parce qu’ils ignoraient l’histoire du passé.

Au point du jour, le lendemain, elle quitta le cottage, après avoir expliqué en peu de mots le motif de son départ à la vieille femme chez qui elle logeait.

Elle prit le premier train pour Winchester, et elle y arriva à dix heures. Elle portait sur elle tout son argent, mais pas autre chose. Les objets qui lui étaient nécessaires ne la préoccupaient nullement. Sa mission