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L’HÉRITAGE DE CHARLOTTE

qu’elle est à votre disposition. J’ai entendu quelqu’un dire que le vin de Porto était bon pour la goutte…, ou peut-être, au fait, ce que j’ai entendu dire, c’est qu’il n’était pas bon. Je sais que le vieux porto et la goutte sont mêlés dans ma tête d’une façon ou d’une autre. Voyez s’il y a quelque chose dans la maison qui pourrait faire plaisir à votre papa, Diana, du vin ou du thé, ou l’édredon qui est sur le lit qui ne sert pas, ou le damier qui est dans le salon, pour l’amuser le soir, ou bien un roman nouveau… il n’y a certainement pas de mal à ce que l’on profite de son abonnement pour prêter un livre à un malade qui n’est pas abonné ? »

Pendant que Georgy lui suggérait l’idée de prêter au capitaine tout ce qu’il y avait de transportable dans la maison, Charlotte envoya chercher une voiture et fit les préparatifs nécessaires pour que rien ne manquât à son amie.

Elle l’enveloppa chaudement pour la protéger contre le vent froid de février et insista pour la conduire à la voiture, ce qui procura aux piétons du voisinage la vision d’une merveille aux cheveux épars.

Charlotte avait toujours été belle, mais Charlotte, promise à Valentin, était une créature d’une splendeur et d’un éclat surnaturels, un ange radieux, planant légèrement sur cette terre, trop grossière pour que son pied pût s’y poser.

Mlle Paget trouva son père atteint d’une très-légère attaque de goutte, une respectable goutte de famille. Il se plaignait un peu, mais n’était nullement abattu d’esprit, ayant au contraire l’alluré d’un homme pour lequel les choses vont comme il veut.

Sa voix avait un ton de satisfaction, sa figure une apparence de tranquillité tout à fait nouveaux pour