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L’HÉRITAGE DE CHARLOTTE

gneur de Cotenoir. Un endroit charmant, ma chère Diana, que j’aurais grand plaisir à vous voir visiter un jour. Voulez-vous prendre une tasse de thé. Les Paget sont une race déchue, vous voyez, mon cher monsieur, une tasse de thé, dans le salon d’une maison meublée, est, hélas ! ce que je puis offrir de mieux à un ami. Les Cromie Paget du comté de Hertford vous donneraient à dîner dans de la vaisselle d’or, avec un domestique debout derrière la chaise de chaque convive ; mais notre branche est une branche plus jeune, beaucoup moins favorisée de la fortune, et moi entre autres, je paie le prix de folies de jeunesse. »

Gustave répondit par un regard sympathique ; mais la sympathie de ce regard était adressée à Diana, et non au représentant mâle de la plus jeune branche des Paget.

Plaindre et soulager les demoiselles en détresse était un attribut des Lenoble, et déjà Gustave commençait à plaindre Diana, en se demandant quel sort pouvait lui être réservé si elle n’avait d’autres protecteurs dans la vie qu’un père qui, lui-même, avouait être dans la misère.

Il vit que la jeune personne était très-belle, il devina à une indéfinissable expression de sa physionomie qu’elle était fière, et, comme il pensait à ses propres filles, à leur existence facile, à leur avenir assuré, le contraste lui parut plus douloureux.

Néanmoins, si chevaleresque que pût être par nature la maison Lenoble, il n’eût pu à première vue prendre un aussi vif intérêt à la fille du capitaine si ses sympathies ne lui eussent déjà été acquises.

Le noble Horatio, quelque peu paternel qu’il fût, avait promptement saisi l’occasion de tirer profit de la beauté et de la vertu de sa fille.