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Page:Braddon - L’Héritage de Charlotte, 1875, tome II.djvu/180

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L’HÉRITAGE DE CHARLOTTE

C’était un soulagement pour lui d’échapper aux agitations de la vie et à l’éclat du jour et de chercher un refuge dans l’obscurité de son cabinet dont les volets étaient fermés et ne laissaient passer la lumière que par les étroites ouvertures qui y étaient pratiquées.

Pour la première fois depuis cette période d’inaction et d’incertitude, il se sentait tout à fait accablé, et, au lieu de passer immédiatement dans son cabinet et de faire sa toilette du matin, comme il avait coutume de le faire à cette heure, il se jeta tout habillé sur son lit de fer et tomba dans un profond sommeil.

Oui, mais avec le sommeil vinrent ses tortures habituelles, il se vit entouré de visages affairés et inquiets et sur toutes les physionomies il voyait une expression de colère et de surprise.

Le marteau de bois frappait les trois coups solennels.

Il entendit la voix faible de Halliday le remerciant de ses soins amicaux, le regard mourant de Halliday se tourna vers lui, plein de confiance et d’affection.

Puis, au milieu des ombres du royaume des songes, défila lentement un cortège funéraire ; un corbillard surmonté de plumes plus noires que la nuit ; un grand nombre de chevaux couverts de housses de deuil, la tête surmontée de panaches noirs agités par le souffle froid d’un vent d’hiver ; une longue suite de personnes enveloppées dans de noirs manteaux se prolongeait à l’infini dans l’espace et ressemblait à une procession de spectres sans commencement ni fin ; cette foule recueillie s’écoulait avec une grande régularité, sans qu’on entendît ni le bruit des pas des hommes ni celui des sabots des chevaux ; on n’entendait que le sifflement monotone du vent glacé qui agitait les plumes