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Page:Braddon - L’Héritage de Charlotte, 1875, tome II.djvu/214

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L’HÉRITAGE DE CHARLOTTE

ment en discutant la question avec son beau-fils. On devrait avoir le divorce pour de pareilles choses. Mais je n’ai jamais entendu dire qu’il y en ait eu de ce genre ; Valentin, je ne puis vivre avec lui, je ne pourrais m’asseoir pour dîner en face d’un homme comme celui-là. Et penser que je l’ai connu quand je n’étais encore qu’une petite fille, et que j’ai dansé ma première polka avec lui, quand cette danse fit sa première apparition, quand on portait des bottes polka, des jaquettes polka, qu’on écrivait ses billets d’invitation sur du papier polka, qu’on chantait des airs de polka, et qu’on exécutait en tapisserie, avec des laines de Berlin, des paysans dansant la polka et autres absurdités de ce genre. Oh ! Valentin, à quel homme se fier si ce n’est à celui qu’on a connu toute sa vie ? »

Haukehurst s’engagea à protéger sa belle-mère contre toute tentative de persécution, de la part de son mari : il ne savait guère quelles difficultés il éprouverait dans l’accomplissement de pareil engagement, car dans l’ignorance où il était de l’état désespéré des affaires de Sheldon, il s’imaginait qu’il ferait quelque tentative pour soutenir sa position dans le monde en obligeant sa femme à réintégrer le domicile conjugal.

Il se rendit au cabinet d’affaires de George, quelques jours après son mariage, pour prendre les conseils de cet astucieux homme de loi. Il le trouva à l’ouvrage et en très-bonnes dispositions d’esprit. C’était sur ses conseils que la célébration du mariage avait été précipitée ; l’enlèvement clandestin de Charlotte pendant le sommeil de Philippe avait été effectué sur le plan tracé par lui ; et il était triomphant à l’idée que le complot avait si bien réussi et que son frère, le plus froid et le plus profond des calculateurs, avait été si complètement joué.