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LA FEMME DU DOCTEUR.

Temple, mais qui prenait pension dans une famille, à Camberwell. Le jeune médecin quitta Graybridge dans la voiture du brasseur, à huit heures de cette matinée resplendissante, en compagnie de Mlle Burdock et de sa sœur Sophronia, qui se rendaient à Londres pour voir une tante aristocratique, logée dans Baker Street. Les jeunes personnes avaient été confiées aux soins de George pendant la durée du voyage.

Les demoiselles et leur chevalier étaient d’une gaieté folle. Londres, lorsque vous êtes confiné entre l’hôpital Saint-Bartholomé et Seven Sisters Road, n’est assurément pas la ville la plus séduisante de l’univers ; mais lorsque vous venez de la province, avec une semaine de congé, cinq livres sterling et quelque menue monnaie en poche, Londres prend un tout autre aspect. George n’était pas enthousiaste ; mais il pensait à son congé avec un sentiment de plaisir tranquille, et appliquait, avec la complaisance la plus exemplaire, son attention à la conversation des filles du brasseur qui lui donnèrent force renseignements sur leur tante et sur les fêtes brillantes données par cette dame et ses connaissances. Mais si aimables que fussent les jeunes personnes, George vit avec plaisir le train arriver dans la gare d’Euston Square et terminer sa surveillance. Il remit les demoiselles Burdock aux mains d’une dame corpulente et assez majestueuse qu’attendait une calèche attelée de deux chevaux. Cette dame le remercia avec un air de suprême condescendance du soin qu’il avait pris de ses nièces. Elle daigna même l’inviter à venir lui rendre visite, ce qui fit rougir Sophronia. Mais, malheureusement, Sophronia ne savait pas rougir avec grâce ; des taches rouges envahirent çà et là son visage, même à l’endroit où au-