Page:Braddon - La Trace du serpent, 1864, tome I.djvu/308

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
300
LA TRACE

d’une certaine façon en mon pouvoir, positivement.

— Mais la possibilité que vous puissiez réclamer de moi autre chose que de l’argent n’est jamais entrée dans mon esprit.

— Mademoiselle, quand je vous vis pour la première fois, ce fut des stalles de l’Opéra, à travers une lorgnette. L’instrument, mademoiselle, était excellent, car il me révéla chaque trait et chaque nuance d’expression de votre beau visage. De l’observation de votre figure, je tirai deux ou trois conclusions sur votre caractère qui se trouvent aujourd’hui confirmer complètement mes prévisions. Vous êtes impressionnable, mais non prévoyante. Vous êtes résolue quand une fois votre esprit est fixé, mais cet esprit est facilement influencé par autrui. Vous avez de la passion, de l’intelligence, du courage ; dons rares et magnifiques qui vous distinguent du reste des femmes ; mais vous ne possédez pas cette puissance de calcul, cette science d’induction qui ne voit jamais les effets sans les rapporter aux causes et que les hommes ont désignée sous le nom de mathématiques. Moi, mademoiselle, je suis mathématicien. Comme tel, je suis en votre présence pour jouer avec vous une partie dangereuse et comme tel, maintenant que l’heure est venue où je puis étaler mon jeu, vous verrez que je tiens les cartes gagnantes.