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LA TRACE

fit panser sa blessure, qui était d’une jolie profondeur, et s’éloigna. Quant à la jeune fille, elle fixa la rivière d’un œil particulièrement triste, puis elle s’éloigna aussi. Je n’aimais pas beaucoup le regard qu’elle avait jeté sur la rivière ; aussi, comme j’avais encore une demi-heure avant le départ du train, je la suivis. Je crois qu’elle le comprit, car elle coupa court bientôt par une petite rue, et quand je fis le détour après elle, on ne la voyait plus ni à droite ni à gauche. Alors, comme je n’avais qu’une demi-heure, je pensai qu’il était inutile de poursuivre cette jeune et infortunée créature à travers tous les tours et détours de tous les bourbiers reculés de Slopperton ; aussi, après quelques minutes de réflexion, je me dirigeai vers la station. Que je sois pendu, si je n’étais pas encore en retard pour le départ du train. Je ne sais comment cela se faisait, mais je ne pouvais chasser la jeune femme de mon esprit, et je ne pouvais m’empêcher de songer à ce qu’elle avait l’intention de faire d’elle et de son petit enfant. Je redescendis donc du côté de l’eau, et comme j’avais une bonne heure et demie à dépenser, je fis un bon bout de chemin, en pensant au jeune homme et à sa blessure sur le front. Peut-être avais-je fait un mille au plus, quand j’arrivai à un bateau solitaire qui était à l’ancre. C’était une embarcation à charbon, et il y avait à bord un jeune homme, assis sur la quille, occupé à fumer