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LA TRACE

dans l’automne d’une année très-orageuse, n’étant pas bon marin, dépassent complètement mon intelligence. »

Raymond paraît très-sérieux et fait deux ou trois tours dans la pièce. Les brillants yeux bleus du marquis le suivent pendant un tour et demi, puis trouvent cette promenade monotone, et se baissent sur ses mains blanches et sur un anneau, objets toujours intéressants à considérer. Bientôt le comte de Marolles s’arrête, s’appuie sur le dossier d’un fauteuil du côté de la cheminée opposé à celui où est assis le marquis, et dit d’un ton de voix très-grave :

« Monsieur de Cévennes, je vais vous entretenir d’un sujet d’une nature vraiment si pénible et si affligeante pour tous les deux, pour vous à entendre et pour moi à communiquer, que je crains presque de l’entamer. »

Le marquis paraît si profondément absorbé dans la contemplation de son anneau surmonté d’une émeraude qu’il a évidemment entendu les paroles de Raymond sans comprendre leur signification ; mais il lève la tête un instant d’un air réfléchi, rappelle les mots qu’il vient d’entendre, les récapitule dans leur ordre, fait un signe de tête et dit :

« Oh ! oh ! de nature affligeante ; vous craignez de l’entamer, n’est-ce pas ? Ne vous tourmentez pas,