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LA TRACE

un miraculeux effort, ramassa le double-six et le présenta d’une manière magnanime à Richard.

« Prenez-le, prenez-le, vieil ami, et qu’il fasse votre bonheur ; si j’avais joué ce domino, j’aurais gagné la partie. »

Après quoi il exécuta deux ou trois pas d’une danse Cherokée, et retomba dans ses ridicules imprécations susdites, en un langage mêlé de français et d’anglais, contre les habitants d’un monde incapable de l’apprécier.

Il fallut un certain temps avant qu’une apparence de calme pût être rétablie ; mais quand le silence régna à peu près, Richard s’adressa ainsi à la société :

« Gentlemen, avant la malheureuse circonstance qui m’a séparé de vous pendant si longtemps, vous me connaissiez bien, je crois, et je suis fier de penser que j’avais votre confiance et votre estime. >

Approuvèrent-ils ? Oh ! complètement. Ils choquèrent tous leurs verres, et en brisèrent trois, ainsi très-probablement ils approuvèrent.

« Je n’ai pas besoin de faire allusion à l’accusation fatale dont j’ai été la victime. Vous êtes, je le comprends, vous êtes informés de tous les incidents de cette affaire, et vous me rendez heureux en me croyant innocent. »

En le croyant innocent ? en le reconnaissant innocent ? Ils étaient si indignés à la simple idée que quelqu’un pût penser autrement, qu’un individu