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LE SECRET
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Le garçon dit ces mots avec une parfaite indifférence, en époussetant machinalement la petite table d’acajou.

Le visage de George se couvrit de la pâleur de la mort.

« Talboys, dit-il, peut-être n’avez-vous pas entendu distinctement le nom, — T, A, L, B, O, Y, S. Allez regarder encore, il doit y avoir une lettre. »

Le garçon haussa les épaules en quittant la salle et revint au bout de trois minutes dire qu’il n’y avait aucun nom ressemblant à celui de Talboys dans la case aux lettres. Il y avait Brown, et Sanderson, et Pinchbek ; seulement trois lettres en tout.

Le jeune homme but son soda-water en silence, et, posant alors ses coudes sur la table, couvrit sa figure de ses mains. Il y avait quelque chose dans son air qui disait à Robert Audley que ce désappointement, insignifiant en apparence, était en réalité une déception pleine d’une grande amertume. Il s’assit lui-même en face de son ami, mais n’essaya pas de lui adresser la parole.

Bientôt George leva la tête, et, prenant machinalement dans un tas de journaux, sur la table, un Times graisseux du jour précédent, il jeta ses yeux distraits sur la première page.

Je ne puis dire combien de temps il pâlit sur un paragraphe au milieu de la liste des décès, avant que son esprit bouleversé pût bien en saisir le contenu ; mais après une pause considérable, il tendit le journal à Robert Audley à travers la table, et, avec un visage qui était passé du bronze foncé à une maladive blancheur, livide et sombre avec un calme effrayant, posa le doigt sur une ligne qui contenait les mots suivants :

« Le 24 du courant, à Ventnor, île de Wight, Helen Talboys, âgée de vingt-deux ans. »