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Page:Braddon - Les Oiseaux de proie, 1874, tome II.djvu/176

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LES OISEAUX DE PROIE

dire quitte à ce gentleman pour le mauvais tour qu’il m’a joué, il y a quelques années.

« Les sourcils de Sheldon s’obscurcirent pendant qu’il disait cela, et il devint de nouveau rêveur. Il faut que cette vieille rancune de mon patron contre son frère touche à quelque très-désagréable affaire, si j’en juge par la manière dont il s’exprime.

« Quelle perspective pour moi ! Déjà favorisé par les naïfs parents de ma bien-aimée, j’étais maintenant assuré de l’appui de George ; bien plus, poussé en avant dans mon ascension vers le Paradis par ce peu sentimental mentor. C’était à en perdre l’esprit… Charlotte une héritière et George désireux de me faire ma part dans les millions accumulés par les Haygarth !

« En ce moment je suis assis dans ma petite chambre, me rappelant le passé et cherchant à sonder les incertitudes de l’avenir.

« Est-il possible que cela arrive ? Serait-il possible que d’un seul élan j’arrivasse à gagner un prix que pourrait envier l’être le plus favorisé de la fortune ? Puis-je l’espérer ? Puis-je le croire ? Non, mille fois non ! La femme que j’aime, la fortune que j’ai si souvent désirée, ne sont pas pour moi !

« 13 novembre. — Ce qui précède a été écrit hier soir, sous l’influence de ma bête noire. Quelle infernale créature et combien elle sait effeuiller et détruire les roses qui se rencontrent sur son chemin, pour découvrir le ver caché au plus profond du cœur.

« J’ai chassé dehors ce matin cette bête noire, en trouvant sur mon assiette une lettre de ma chérie.

« — Hors d’ici ! va-t’en, bête maudite ! me suis-je écrié, tu n’es autre chose qu’un démon malveillant et je veux