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Page:Braddon - Les Oiseaux de proie, 1874, tome II.djvu/217

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LES OISEAUX DE PROIE

— Mon cher monsieur Sheldon, comment pourrais-je assez vous remercier de ces bonnes paroles ! s’écria Valentin très-ému, mais très-surpris des intentions charmantes de l’agent de change.

— Ne vous pressez pas tant, reprit froidement le gentleman, vous n’avez pas encore entendu tout ce que j’ai à vous dire. Bien que je pusse consentir à suivre une ligne de conduite contraire à celle que, comme homme du monde, on aurait pu s’attendre à me voir choisir, je n’ai pas l’intention de laisser Charlotte, et vous, faire des folies. Il ne s’agit pas de se contenter d’une chaumière et d’un cœur, avec la confiance que papa et maman seront là pour le reste. Pour parler plus clairement, si je consens à vous admettre comme futur de Charlotte, il faut que l’un et l’autre vous consentiez à attendre. Il m’importe, vous le comprenez, de savoir si vous êtes en état de créer à ma belle-fille une situation convenable. »

Valentin fit un soupir de doute.

« Je ne pense pas que Mlle Halliday ou moi éprouvions un empressement insensé à nous mettre en ménage, dit-il d’un air pensif ; cependant, vous le comprendrez aussi, il faut fixer une limite à ce temps d’épreuve. Je crains que l’attente ne soit bien longue, si je dois arriver à une position qui vous satisfasse avant de me marier.

— Votre perspective d’avenir est-elle donc si décourageante ?

— Non ; elle me semble, au contraire, à moi très-brillante. Mais ce que peut gagner un journaliste ne saurait créer l’indépendance à laquelle vous devez prétendre. Pour le moment, je gagne à peu près dix livres par mois ; avec du travail, je puis porter ces dix livres