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Page:Braddon - Les Oiseaux de proie, 1874, tome II.djvu/219

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LES OISEAUX DE PROIE

si elle se marie avec mon assentiment, je lui constituerai une dot très-convenable. Vous trouverez, je pense, que c’est bien agir.

— On ne pourrait agir mieux, ni plus généreusement, » répliqua Valentin enthousiasme.

L’air d’aimable franchise de Sheldon l’avait entièrement subjugué : en dépit de tout ce que George lui avait dit contre son frère, il était entièrement disposé à avoir confiance dans Philippe.

« Mais en retour, j’attends quelque chose de vous, répliqua Sheldon. Il faut que vous me promettiez que vous ne ferez rien de sérieux, sans que j’en aie connaissance. Vous ne chercherez pas à me tromper. Vous ne vous enfuirez pas avec Charlotte, un beau matin, pour aller vous faire enregistrer à quelque bureau de mariage ou rien de pareil, n’est-ce pas ?

— Je ne le ferai point, répondit résolument Valentin.

— Sur ce, donnez-moi la main, » s’écria l’agent de change.

Ils échangèrent une poignée de main pendant laquelle les doigts de Valentin furent presque broyés sous la froide pression de ceux de Sheldon. À ce moment, Valentin entendit les notes amoureuses d’une romance de Mendelssohn exécutée sur le piano par sa bien-aimée ; cette romance lui rappela aussitôt qu’il était las et de la conversation et du porto de l’agent de change.

Sheldon ne fut pas long à s’apercevoir de l’impatience de son hôte, et, ayant produit complétement l’impression qu’il voulait produire, il ne demandait pas mieux lui-même que de mettre fin à l’entretien.

« Vous ferez bien de passer au salon, dit-il d’un ton de bonne humeur, je vois que vous êtes dans un état de fièvre qui doit vous rendre insupportable la société