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Page:Braddon - Les Oiseaux de proie, 1874, tome II.djvu/22

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LES OISEAUX DE PROIE

vaste ville n’ont pas le pouvoir d’enlever de mon cœur son privilège le plus cher, celui de se dire,

« Votre humble suivante et servante,

« Rebecca Haygarth. »

« Il me sembla voir dans cette lettre, comme l’ébauche d’un ancien roman. Pourquoi la vue de cette vieille maison a-t-elle fait pleurer Matthieu ? Et pourquoi le souvenir du Wauxhall et de la foire de Saint-Barthélemy lui sont-ils si doux ? Puis, cette tristesse lorsque le passé lui revient à l’esprit ?

« Qu’est-ce que tout cela signifie, je me le demande ? Était-ce seulement sa jeunesse passée que regrettait le pauvre Matthieu, rangé, converti, et wesleyanisé, ou était-ce quelque souvenir plus doux que celui de ses premières années qui s’associait dans sa pensée à celui des illuminations coloriées du Wauxhall et de la misérable maison de Clerkenwell ? Qui pourra sonder le cœur d’un homme mort depuis cent ans ? Je pourrais épuiser un volume de lettres avant de pénétrer le mystère de cet homme.

« Les deux autres que j’ai choisies ont trait aux dernières semaines de la vie de Matthieu. J’y crois voir la trace de quelque mystère domestique que cet honorable citoyen cachait à sa femme, mais que dans plusieurs occasions il avait été à demi décidé à lui révéler. Peut-être que si la piété de la dame, laquelle, pour le dire en passant, paraît s’être montrée très-sincère et très-méritante, eût été un peu moins dogmatique dans son expression, le cœur du pauvre Matthieu se fût plus facilement ouvert.

« Qu’il y ait eu un secret dans la vie de cet homme, j’en suis convaincu ; mais cette conviction ne me fournit