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Page:Braddon - Les Oiseaux de proie, 1874, tome II.djvu/43

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LES OISEAUX DE PROIE

faire, si ma grippe qui me rend idiot, quand elle ne me fait pas éternuer, me permet de faire quelque chose de raisonnable.

« J’ai divisé et classé ces lettres d’abord d’une façon, et ensuite d’une autre, jusqu’à ne plus m’y reconnaître. Dans cette situation, ce que j’ai de mieux à faire est d’abandonner toute idée de classification, de les relire tranquillement en suivant autant que possible l’ordre des dates, et en prenant note de ce qui me paraîtra en valoir la peine. L’esprit pénétrant de George fera le reste.

« En conséquence, je commence mes notes par un extrait de la première lettre de la série. Je m’abstiens de conserver l’orthographe de Matthieu, qui est bien la plus fantaisiste que j’aie jamais rencontrée.

« 14 Décembre 1742. — … En vérité, ma chère Ruth, j’ai la plus grande affection pour vous et je vous dirai ce que je ne voudrais dire à personne. J’ai revu cette jeune fille que j’avais eu la bonne fortune de protéger contre les insultes des mauvais sujets au mois de septembre dernier. C’est bien la plus jolie créature qui se puisse voir, élégante, gracieuse, de ton, de paroles, comme une patricienne. La personne la mieux élevée d’Ullerton ne l’est pas mieux qu’elle. Je l’ai rencontrée dans les environs de la prison du Shériff, où son père est renfermé en ce moment, et j’ai eu avec elle une très-agréable conversation. Elle m’a reconnu de suite et a paru bien aise de me rencontrer. Ses jolis yeux bleus se sont remplis de larmes lorsqu’elle m’a remercié d’avoir bien voulu être son défenseur à la Foire. Ainsi, vous le voyez, Madame Ruth, votre frère est mieux apprécié à Londres qu’ailleurs. Si vous aviez vu la pauvre créature et l’aviez entendue racon-