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LES OISEAUX DE PROIE

« Cela m’occasionna une nouvelle inquiétude. Serait-il possible que quelque renseignement plus important que tous ceux que j’avais transcrits eût échappé à mon attention.

« Je me brisais le cerveau dans mes efforts pour me rappeler ce que pouvait être le contenu de la lettre absente ; mais je ne trouvai rien qui me parût valoir la peine d’être noté dans les lettres que j’avais laissées de côté.

« Je demandai à Mlle Judson si elle ne soupçonnait pas la personne qui avait pu ouvrir le paquet. Elle me regarda avec un sourire glacial, plus glacial encore que l’atmosphère de son parloir, et d’une voix narquoise :

« — Ne me demandez pas si je connais la personne qui a abusé de ces lettres ; votre surprise a été admirablement bien jouée, mais on ne me trompe pas deux fois. Lorsque vous vous êtes présenté, j’ai eu des soupçons ; mais vous étiez porteur d’une lettre de mon frère, et, en bonne chrétienne, j’ai repoussé ces soupçons. Je vois maintenant que j’ai été la dupe d’un imposteur et qu’en vous confiant ces lettres je les ai confiées à un émissaire de Théodore Judson.

« Je protestai que jamais, à ma connaissance, mes yeux ne s’étaient arrêtés sur aucun des Théodore Judson ; mais la défiante parente secoua la tête avec un sourire froid et sec, exaspérant au plus haut point.

« — On ne me trompe pas deux fois, dit-elle. Quel autre que Théodore Judson a pu se servir de vous ? Quel autre que Théodore Judson est intéressé à la fortune des Haygarth ? Oh ! c’est bien digne de lui d’employer un étranger ? Il savait que ses efforts personnels seraient infructueux ! C’est bien digne de lui de surprendre ma confiance par l’entremise d’un vil salarié !