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Page:Bremer - La vie de famille dans le Nouveau-Monde vol 2.djvu/368

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LA VIE DE FAMILLE

Il y a ici des foyers américains dans lesquels je voudrais pouvoir te conduire : dans l’un est une jeune mère, veuve ; elle élève cinq beaux petits garçons pour en faire de bons chrétiens, de bons citoyens. Dans d’autres foyers, des époux sans enfants répandent du charme sur leur vie par un dévouement mutuel ; en cultivant leur intelligence, ils chassent l’ennui de leur demeure et font de la maladie un lien qui rapproche encore davantage leurs cœurs, le ciel et la terre. Il y a surtout un foyer qui, je le sais, te plairait comme à moi ; car, s’il est beau de voir des individus vivre bien ensemble, il est encore plus rare de les voir mourir ainsi. Dans ce foyer il y a une mourante ; c’est une jeune fille, belle comme un bouton de rose, avec des roses si fraîches sur ses joues arrondies, que pas un étranger ne se douterait que la mort est assise près d’elle. Mais la jeune fille le sait, sa mère aussi, et toutes deux se préparent, durant les jours et les nuits de souffrances qu’elles passent ensemble, à leur prochaine séparation ; mais c’est avec une clarté et un calme célestes : elles en parlent comme de quelque chose de beau pour la jeune fille, qui se prépare à faire partie de la société des anges en portant la croix des douleurs avec une patience croissante et plus d’amour pour tous. Il n’y a pas de ténèbres dans cette chambre de malade. Les amis y apportent cadeaux et amour pour recevoir de la jeune moribonde, tandis qu’elle s’arrête sur le bord du tombeau, des paroles ou un regard venus du ciel, avec lequel elle est déjà en relation.

Cette clarté en face de la mort, cette préparation, sont plus communes chez les Anglais et les peuples de l’Amérique du Nord que dans tout autre pays à moi connu. Ils considèrent comme un droit à eux appartenant de connaître, quand c’est possible, leur état et le danger de mort