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DANS LE NOUVEAU-MONDE.

murailles donnaient à ces tiroirs l’apparence d’être fort petits ; mais chacun d’eux peut contenir plusieurs cercueils.

J’avais vu dans l’hôpital l’esprit du christianisme, j’ai retrouvé celui du paganisme dans le Campo Sancto.

Le corps des riches gisait dans les hautes murailles aux inscriptions en lettres d’or, celui des pauvres était enfoui dans la terre sans autre marque de souvenir qu’une petite motte verte, ou une fleur, ou un arbuste, annonçant la vie de la lumière sur la tombe. Il y avait dans l’intérieur du « Campo Sancto » un grand carré où l’on voyait des amas, des bancs d’ossements, de têtes de morts. C’était le lieu où l’on enterrait les noirs ; car il est défendu ici d’inhumer un nègre dans une bière. On jette le corps nu, où à moitié nu, dans la terre, et par dessus de la chaux ou des espèces de terre qui le consument rapidement. Au bout de huit ou quinze jours, on l’exhume pour faire place à d’autres, et on jette les os en tas, afin que le soleil les dessèche.

Pendant que nous étions là, a eu lieu, près du carré des nègres, l’inhumation d’une personne de peu. J’ai remarqué qu’on mettait oreiller, couverture et quelques vêtements dans la fosse avec le mort.

Durant les derniers jours que j’ai passés à la Havane, j’ai visité, avec madame Tolmé, plusieurs jolis jardins appartenant à des particuliers, pour apprendre à mieux connaître diverses fleurs et divers fruits. J’ai fait la connaissance du professeur de botanique Don Felipe Poe, et il a eu la gracieuseté de me donner quelques papillons de Cuba, dont l’un, considéré comme le plus beau, est appelé ici Urania. Il est d’un beau vert foncé, et a le lustre du velours.