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Page:Bremer - La vie de famille dans le Nouveau-Monde vol 3.djvu/288

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LA VIE DE FAMILLE

elle était très-brillante au milieu de la nuit qui s’épaississait. Toute la contrée était basse, rien n’y formait saillie. Quelques nuages nageaient ou plutôt s’étaient couchés comme de petites îles à l’ouest, près de l’horizon, et se fondirent insensiblement dans le rouge du soir mourant. J’essayai en vain d’y découvrir des idées poétiques ; ce que je pus imaginer de mieux, ce fut une femme en chapeau de quakresse assise sur une maison. Elle finit par se dissiper ainsi que tous les nuages. La lumière de la Veuve et celle d’Entreprise s’étaient éteintes. Les moindres souffles du vent dormaient ; tout dans l’espace était calme, tout sur le rivage était obscur. La lumière des touterelles brûlait seule, mais plus faiblement ; à la fin elle s’éteignit aussi, mais je la vis cependant briller dans leur foyer. Les alligators et l’oiseau du soir continuèrent leur duo pendant toute la nuit.

Je dormis peu, quoique me portant parfaitement ; mais les esprits de l’air m’appelaient, et j’étais obligé de revenir sur la petite plate-forme de l’arrière, les portes ouvertes du salon se trouvaient de ce côté. Le duo entre l’oiseau et les alligators durait encore au point du jour, lorsque les étoiles s’éteignirent et laissèrent celle du matin briller seule au-dessus du lac. Quand le soleil se leva, tous les oiseaux se mirent à chanter et les poissons à danser. Les monstres du fleuve nagèrent autour de nous en songeant, — à ce qu’il paraissait, — à notre bateau et à nos provisions. Le cruel chasseur n’est plus ici, nous vivons en paix avec le monde entier, et ne pensons, comme les alligators, qu’au déjeuner.

Plus tard.

Le capitaine a envoyé deux nègres à la pêche ; partis