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Page:Bremer - La vie de famille dans le Nouveau-Monde vol 3.djvu/299

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DANS LE NOUVEAU-MONDE.

On a commencé en Géorgie à les employer avec succès dans les fabriques.

Je me souviens maintenant que j’ai visité l’année dernière, près d’Augusta, une filature de coton où l’on employait des travailleurs noirs. Je ne crois pas que les nègres auraient choisi spontanément cette occupation avec son fracas, sa minutie, son air poudreux et malsain, habitués qu’ils sont au grand air. Je demandai à quelques femmes occupées à filer comment elles se trouvaient de ce travail. Quelques-unes me répondirent qu’il leur plaisait autant qu’un autre ; mais une négresse âgée, ayant une bonne expression de figure, répondit avec l’expression d’une lassitude et d’un abattement profonds : « Non, je n’aime pas cette besogne. » Cela ne me surprend pas.

Ce foyer est rempli de jeunes et joyeux visages, six garçons et deux filles. Madame Cooper est la mère juvénile, agréable et gaie de cette jolie bande d’enfants.

Il y a non loin d’ici soixante dix ou quatre-vingts petits enfants nègres, que je suis allée voir un de ces matins. Une couple de négresses ressemblant à des sorcières, avec leurs verges à la main, les gouvernaient par la crainte et l’effroi. On m’avait dit qu’elles leur apprenaient à prier. J’en réunis donc une petite bande autour de moi et leur récitai l’Oraison dominicale en les priant de répéter les mots après moi. Les enfants se mirent à rire, montrèrent leurs dents blanches, me prouvèrent évidemment qu’ils ne connaissaient pas la signification de cette admirable prière, et ignoraient qu’ils avaient un Père dans le ciel. Ces enfants étaient bien nourris. On les tient ici séparés de leurs parents, parce que dans ce moment il y a des fièvres dans la plantation où ceux-ci travaillent.

Si je n’ai pas trouvé ici le réformateur que je m’atten-