Page:Brisson - Pointes sèches, 1898.djvu/286

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tements de 130 francs par mois. Il ne songeait plus au théâtre, ses idées avaient pris un autre cours : il comptait suivre honnêtement la filière administrative et conquérir, au bout de beaucoup d’années, le rond de cuir de chef de bureau, et terminer sa vie dans une maisonnette à volets verts, en pêchant à la ligne le long de la Marne. Mais, certain soir, quelques camarades l’amenèrent dans un Cercle d’amateurs, le Cercle Gaulois, composé de jeunes gens qui s’amusaient à jouer la comédie… Antoine reçut le coup de foudre. C’en était fait de sa destinée.

Le Cercle Gaulois donnait ses représentations dans un édicule en planches, qui s’intitulait pompeusement Théâtre de l’Élysée des beaux-arts. Il montait de vieilles pièces de Labiche et d’Alexandre Dumas. « — Pourquoi ne cherchons-nous pas des œuvres nouvelles ? demanda Antoine à ses compagnons. — Dame ! Si vous en connaissez ! »… Il se mit en campagne. Il se fit présenter à Paul Alexis, à Émile Bergerat, à Léon Hennique, à Théodore de Banville ; son enthousiasme les séduisit ; ils promirent leur concours. Antoine arrêta le programme de la première séance, qui comprenait : la Cocarde, par Jules Vidal ; Un Préfet, par Arthur Byl ; Mademoiselle Pomme, par Paul Alexis, et Jacques Damour, par Léon Hennique, d’après Émile Zola. Antoine avait choisi la date du 31 mars 1887, le dernier jour du mois, car il comptait user de ses appointements pour payer la location de la salle. Il avait envoyé des invitations à tout