Page:Brizeux - Œuvres, Histoires poétiques I-II, Lemerre.djvu/196

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J’ai bu l’absinthe avec sa fange,
Au calice doré de l’ange
Souvent j’ai savouré le miel.

Doux Lo’-Théa, fraîche vallée,
Paroisse où mon enfance errait toute à l’espoir,
Où, par ses ennuis rappelée,
Ma jeunesse errante et troublée
Chaque automne vient se rasseoir,

Pardonnez, ô belle nature.
Tous ces combats mauvais du cœur et de l’esprit ;
Bien que souffrant de ma blessure,
Plus calme enfin je me rassure
Sous la main qui frappe et guérit.

Celui qui vous fit tant de charmes,
A-t-il, maître jaloux, défendu d’être heureux ?
Chemin d’épreuves et d’alarmes.
Faut-il vous arroser de larmes
Avant d’arriver dans les cieux ?

J’en crois votre aspect qui console.
Hêtres, pins murmurants, fleurs d’or, et vous, ruisseaux,
Votre beauté n’est point frivole ;
L’ennui qui prés de vous s’isole
S’endort mieux au bruit de vos eaux.

Puisse, légère aussi, la peine
Comme l’eau de ce pré sur moi glisser et fuir !
Détaché d’ambition vaine.
Sans fiel, sans détours et sans haine,
Qu’ai-je à craindre de l’avenir ?