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III

Ô sort ! ô changement des choses et des âges !
Un double étang couvrait jadis ces marécages.
Sur leur bord un manoir s’élevait crénelé :
Le haut manoir n’est plus, un étang s’est comblé,
Et le profond canal dont l’habile structure
Vint unir ce qu’avait séparé la nature,
À peine le chasseur, dans ces joncs égaré.
En retrouve sous l’herbe un vestige ignoré ;
Grande œuvre par l’orgueil péniblement construite,
Mais que maudit l’amour et par le temps détruite.
 

IV

Dames et chevaliers, artisans et vassaux
Du manoir de Plaisance inondent les préaux :
L’évêque est sous un dais avec tous ses chanoines ;
Dans la foule reluit le front chauve des moines ;
Les sonneurs sont aussi venus et les jongleurs.
Pour le maître du lieu, sous un arceau de fleurs,
Debout et rayonnant, il contemple en silence
Une barque dorée et que l’étang balance.
C’est qu’un puissant travail, et des maîtres vanté,
Aujourd’hui s’inaugure avec solennité :
Tous sont priés, et noble, et bourgeois, et manœuvre,
Et Monseigneur de Vanne a voulu bénir l’œuvre.
Çà donc, joyeux sonneurs, violes et hautbois,
Harpes des anciens jours, résonnez à la fois !