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NOTICE

de paix, il éprouvait le besoin d’expliquer cette levée d’armes de ses camarades, en la dégageant de toute complicité avec les ennemis de la France :

Ô reine des Bretons, liberté douce et fière,
As-tu donc sous le ciel une double bannière ?
En ces temps orageux j’aurais suivi tes pas
Où Cambronne mourait et ne se rendait pas !
Dans ces clercs, cependant, ton image est vivante.
Et chantant leurs combats, Liberté, je te chante.
Ils n’avaient plus qu’un choix, ces fils de paysans :
Ou prêtres ou soldats ; — ils se sont faits chouans ;
Et leur pays les voit tombant sur les bruyères.
Sans grades, tous égaux, tous chrétiens et tous frères…
Hymnes médiateurs, éclatez, nobles chants !
Vanne aussi m’a nourri ; mon nom est sur ses bancs ;
J’ai nagé dans son port et chassé dans ses îles ;
J’ai vu les vieux débris de ses guerres civiles ;
Puis, je connais le cloître où le moine Abélard
Vers la libre pensée élevait son regard.
Planez sur les deux camps, ô voix médiatrices !
Baume des vers, couvrez toutes les cicatrices !
.     .     .     .     .     .     .     .     .     .     .     .     .     .     .     .
Ainsi, de l’avenir devançant l’équité.
Quand l’atroce clairon n’est plus seul écouté,
Pour nos fils j’expliquais ta dernière querelle,
Au joug des conquérants race toujours rebelle.
Qui portes dans tes yeux, ton cœur et ton esprit,
Le nom de Liberté par Dieu lui-même écrit.
Et cependant, pleurez, fiers partisans de Vanne !
Celle que nous suivions depuis la duchesse Anne
Dans le sang se noya ! Les noirs oiseaux du Nord
Volèrent par milliers autour de l’aigle mort :
Les corbeaux insultaient à cette grande proie
Et dépeçaient sa chair avec des cris de joie !

On a dit que Brizeux, après les vives impressions de son enfance,