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et d’espérance, plein de foi en la bonté de Dieu et d’espérance dans une vie meilleure. Il s’accusait de ses fautes avec l’humilité d’un cœur pur : « J’étais si faible ! » disait-il. Le jour où son corps fut porté à l’église et de là au cimetière dans un caveau d’attente, l’ami qui ne l’avait pas quitté jusqu’à la dernière heure, se rappelant qu’à la mort de Klopstock on avait récité sur sa tombe les plus touchants épisodes de La Messiade, crut aussi pouvoir lire sur le cercueil de Brizeux quelques-uns des plus beaux chants sortis de son âme. Le lendemain il écrivait à un ami ces paroles assez peu orthodoxes, je le confesse, mais qui résument avec fidélité le christianisme confiant et les suprêmes aspirations de Brizeux : « Le cercueil va partir pour Lorient. Ce pauvre corps, que j’ai vu tant souffrir, reposera sous la terre de Marie ; l’âme est dans une autre Bretagne, en des mondes meilleurs, avec Platon, Virgile, saint Jean, Raphaël, saint Corentin, patron de Kemper, et saint Cornéli, patron des bœufs. »

Août 1858

III

Nous avons déjà dit que les vœux du poète mourant ont été réalisés. Le corps de Brizeux a été ramené dans sa patrie ; M. Rouland, ministre de l’instruction publique, s’était empressé de contribuer à cette oeuvre pieuse. L’auteur des Bretons aura sa tombe dans sa ville natale. Puisse-t-il aussi avoir son monument dans la vallée du Scorf, comme l’ont souhaité ses amis de Paris, comme il le demandait lui-même en ces vers, un monument simple, rustique, un monument celtique et chrétien tout ensemble, une pierre et une croix au pied d’un chêne !

 
Vous mettrez sur ma tombe un chêne, un chêne sombre,
Et le rossignol noir soupirera dans l’ombre :
« C’est un barde qu’ici la mort vient d’enfermer.
Il aimait son pays et le faisait aimer. »