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PHILOSOPHIE ANCIENNE

l’existence de l’un, non seulement pour l’un lui-même, mais encore pour les autres choses, et en outre rechercher encore ce qui arrivera à l’un et aux autres choses en supposant que l’un n’existe pas. Il y a ainsi quatre moments ou quatre hypothèses à examiner : si l’un est, qu’en résulte-t-il : 1° pour lui-même ; 2° pour les autres choses ? si l’un n’est pas, qu’en résulte-t-il : 3° pour lui-même ; 4° pour les autres choses ? Mais chacune de ces quatre hypothèses est examinée elle-même à un double point de vue ; il y a ainsi huit hypothèses, au lieu de quatre, qui sont successivement examinées.

Quelle est la différence entre les deux points de vue auxquels se place successivement Platon pour examiner chacune des quatre hypothèses principales ? À cette question nous ne trouvons point de réponse précise dans le texte du dialogue, excepté au commencement de la seconde hypothèse, où nous rencontrons une indication précieuse ; partout ailleurs, Platon se contente de dire, après avoir énuméré les conséquences d’une hypothèse : « Revenons en arrière et reprenons les choses dès le début ». Il doit cependant y avoir, présente à sa pensée, une règle ou une loi qui préside à cette sorte de rythme auquel est soumise toute la discussion.

Il n’est pas bien difficile de donner la réponse et de trouver un fil conducteur qui nous guide dans ce labyrinthe, si l’on veut bien faire attention à la manière dont commence la seconde hypothèse et si, à la lumière de ce renseignement, on examine attentivement toute la suite de la discussion (142, B ; 142, C).

« Vois dès le commencement. Si l’un existe, est-il possible qu’il existe et qu’il ne participe pas à l’être ? — Cela n’est pas possible. — Il y aura l’être de l’un, qui ne sera pas la même chose que l’un : car autrement, il ne serait pas l’être de l’un, et celui-ci n’y participerait pas, et il serait indifférent de dire « l’un existe » et de dire « l’un un » ; or telle n’est pas à présent notre hypothèse, à savoir ce qui résultera de l’un pris en soi, mais de l’un en tant qu’il existe. N’est-ce pas là notre objet ? — Sans doute. — L’être signifie donc autre chose que l’un ? — Nécessairement. — Lorsque quelqu’un dit sommairement que l’un est, donne-t-il à entendre autre chose que lorsqu’il dit que l’un participe à l’être ? — Sans doute. »