Page:Brochard - Études de philosophie ancienne et de philosophie moderne.djvu/378

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S’il ne croyait pas sincèrement à la réalité historique de la révélation, on ne comprendrait guère qu’il se fût donné tant de peine pour concilier la raison et la foi. Surtout, on ne s’expliquerait pas le ton toujours très respectueux sur lequel il parle de la révélation religieuse en général. Peut-on supposer qu’il n’ait pas cru sincèrement à la réalité de la révélation, le philosophe qui a écrit cette page ? « Ce n’est pas un effet du hasard que la parole de Dieu dans les prophètes s’accorde parfaitement avec cette même parole qui se fait entendre en nous… Ainsi ce fondement de toute la théologie et de l’Écriture, bien qu’il ne puisse être établi par raisons mathématiques, peut être néanmoins accepté par un esprit bien fait, car ce qui a été confirmé par le témoignage de tant de prophètes, ce qui est une source de consolation pour les simples d’esprit, ce qui procure de grands avantages à l’État, ce que nous pouvons croire absolument sans risque ni peine, il y aurait folie à le rejeter par ce seul prétexte que cela ne peut être démontré mathématiquement, comme si, pour régler sagement la vie, nous n’admettions comme vraies que des propositions qu’aucun doute ne peut atteindre, ou comme si la plupart de nos actions n’étaient pas très incertaines et pleines de hasard. » « … Mais avant d’aller plus loin, je veux marquer ici expressément (quoique je l’aie déjà fait) l’utilité et la nécessité de la sainte Écriture ou de la révélation, que j’estime très grandes ; car, puisque nous ne pouvons, par le seul secours de la lumière naturelle, comprendre que la simple obéissance soit la voie du salut, puisque la révélation seule nous apprend que cela se fait par une grâce de Dieu toute particulière que la raison ne peut atteindre, il s’ensuit que l’Écriture a apporté une bien grande consolation aux mortels. Tous les hommes, en effet, peuvent obéir ; mais il y en a bien peu, si vous les comparez à tout le genre humain, qui acquièrent la vertu en ne suivant que la direction de la raison, à ce point que, sans le témoignage de l’Écriture, nous douterions presque du salut de tout le genre humain. »

Enfin il faut considérer que la théorie de la science et celle [345]