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SOUVENIRS D’UNE MORTE VIVANTE

l’insurrection un otage, qui par la force des choses est devenu fatalement une victime. Le premier coup fut donc porté par Thiers et une sentinelle fut tuée ; homme pour homme.

Depuis le 15 mars, tout était prêt pour déménager à la minute, caisses et archives.

Vers les 10 heures du matin nous entendîmes des marchands de journaux crier dans les rues : « Surprise, Montmartre attaqué, canons pris, la Garde Nationale fraternise avec l’armée, les soldats mettent la crosse en l’air, le général Lecomte est prisonnier ! »

Mon mari et moi nous allâmes pour savoir ce qu’il y avait de vrai dans ces racontars. Le faubourg St-Germain semblait si éloigné de la vie active des autres faubourgs.

Nous passâmes sur la Place de l’Hôtel de Ville, où il y avait une grande animation. Les vendeurs de journaux avaient dit vrai.

Le comité central au complet était réuni à l’Hôtel de Ville. Ils étaient tous, trop heureux, le soleil s’était mis de la partie une journée splendide. Le Paris qui voulait son affranchissement semblait respirer une atmosphère plus salutaire, nous pensions en effet qu’une ère nouvelle allait s’ouvrir. Mais il ne suffit pas d’avoir triomphé, il faut savoir garder le terrain conquis.

Le peuple et le comité central ne pensaient même pas à prendre des mesures nécessaires pour continuer leur victoire et assurer son succès. Il était 2 heures environ, lorsque nous étions à la place de l’Hôtel de