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CHAPITRE XXV


Étant retournés à la Bastille, nous retrouvâmes nos amis assez bouleversés, le cercle de feu commençait à se resserrer de plus en plus, nous n’avions plus ni vivres ni argent. Les amis avaient faim ! nous ne savions que faire. Toutes les boutiques et les maisons étaient absolument closes. Le service des vivres et de la solde ne s’effectuait plus pour notre bataillon depuis la prise de Passy. Après l’explosion de l’Hôtel de Ville, la commune s’était réfugiée au 11me arrondissement. Nous décidâmes de déléguer le capitaine M…, qui dut aller à la mairie du 11me arrondissement et expliquer les faits, les amis voulurent que je l’accompagne, ce qu’il accepta avec plaisir. Nous nous comptâmes et nous partîmes. À la Mairie il y avait foule : après quelques minutes d’attente, M… me dit : « Restez assise, je vais tâcher de me faufiler, cela ira plus vite. »

J’ai attendu assez longtemps, la salle se vidait ; voyant qu’il ne revenait pas, j’ai pris la résolution d’entrer, il était parti. J’ai trouvé Delescluse, je lui ai dit ce qui était arrivé ; en effet, M… avait touché l’argent, un effectif assez élevé, nous n’avions pas touché de solde depuis six jours ! Je ne sais ce qui est arrivé, a-t-il été arrêté, a-t-il pris la fuite, toujours est-il qu’on ne l’a pas revu et que nous sommes restés sans le sou.