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SIXIÈME PARTIE

morte et on n’a pas osé me le dire ; je vais retourner d’où je viens, rejoindre mes amis à la rue Haxo, j’irai me rendre et je subirai le même sort qu’eux. »

Je quitte la rue, je suis le quai Voltaire, je passe devant la boutique d’un armurier, lequel avait fait partie de la 7me compagnie du 17me de la Garde Nationale ; lorsque j’étais de service, j’avais quelques fois causé avec lui, je savais qu’il avait plutôt des idées larges.

J’ouvre la porte du magasin, la femme de l’armurier me reconnaît, elle vient à moi ; elle aussi est très surprise, mais plus intelligente que les autres, elle me fait entrer dans son arrière boutique, me fait asseoir et me raconte ce qui va suivre :

D’abord elle m’apprend que son mari est arrêté, qu’elle ignore pourquoi, sous prétexte qu’il s’est laissé dévaliser par les insurgés. Il est donc accusé d’avoir favorisé les Révolutionnaires contre le gouvernement légal, en laissant prendre les armes qu’il avait dans son magasin.

« Mais j’espère que cela n’aura pas de suites graves, parce que mon mari avait cessé son service depuis assez longtemps, ayant été malade.

» Pour vous, chère amie, je vais tout vous dire. Dans la nuit du mardi et la journée de mercredi, il s’est passé des choses atroces dans le quartier. Dans la rue du Bac, la rue de Lille, la rue de Beaune on a tiré par les fenêtres, plusieurs fédérés furent tués, alors une lutte effroyable s’en suivit.

» Votre mère très excitée, insultait les soldats qui voulaient pénétrer chez elle et chez vous.