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SOUVENIRS D’UNE MORTE VIVANTE

l’alphabet et qu’il y avait beaucoup de monde devant moi, le temps me semblait bien long.

Ma présence dans ce milieu n’était pas sans quelques dangers pour moi. Le plus faible hasard pouvait me perdre. Je suis restée près de deux heures avant de passer ; mon tour arrive, je suis devant la table fatale, il me semblait être devant un bureau inquisitorial, je craignais que le courage et le sang-froid ne m’abandonnassent. Sur cette table il y avait des quantités de dossiers épinglés et numérotés. On questionnait chaque visiteur. Je n’étais pas sans inquiétude.

— Comment vous appelez-vous ?

— Marie Emery.

— Où demeurez-vous ?

— À Courbouzon, près de Beaugency.

— Êtes-vous parente du condamné J. R. ?

— Oui, monsieur, c’est mon cousin.

— Comment se fait-il que vous soyez à Paris, et depuis quand êtes vous à Paris ?

— Je suis à Paris depuis trois semaines, je suis venue pour voir mon cousin et je repartirai demain.

— Bien, passez ! La visite se termine à 4 heures.

Comme j’étais heureuse que tout fût fini, j’avais chaud, je vous assure. Puis comme toujours, l’imagination en de tels moments, parcourt des kilomètres à la seconde. Il me semblait que tout le monde avait les yeux sur moi. Comme j’avais hâte d’être sortie de cet enfer !

Lorsque je fus dehors, on m’indiqua le chemin pour